La mer monte en Nouvelle-Aquitaine, ne regardons pas ailleurs

Les Journées nationales d’études de l’ANEL (association nationale des élus du littoral) se sont déroulées les 24 et 25 octobre, à la Cité mondiale de Bordeaux. Vital Baude, conseiller régional délégué au littoral, représentait la Région ce  en ouverture de ces Journées.

Voici le texte de son intervention.

Avec ses 720 km de côtes, ses îles, ses marais littoraux, ses lacs côtiers, ses estuaires ou le plus long cordon dunaire d’Europe, la Nouvelle Aquitaine possède une grande diversité d’espaces naturels qui sont une richesse en matière de paysages, à la base de notre exceptionnel cadre de vie et de notre grande attractivité mais aussi en matière de biodiversité, indispensable à notre existence et pour son rôle de protection ou de régulation. Ils sont également à la base de nombreuses activités économiques comme la pêche, l’ostréiculture ou le tourisme et représentent de formidables perspectives en matière de bio mimétisme.

En face de ces richesses, existent un certain nombre de risques. Le GIEC a très récemment tiré, une fois de plus, la sonnette d’alarme avec des prévisions générales autour d’1m d’augmentation du niveau des océans à la fin du siècle. En nouvelle Aquitaine, le rapport Aclima’Terra nous indique que cette hausse sera entre 30cm (si nous arrêtons immédiatement de produire des gaz à effet de serre) et 1,50m si nous restons sur la trajectoire actuelle. Ces risques naturels sont donc grandissants et dans notre région :

  • la submersion a conduit à la mise en œuvre de 7 PAPI en Charente Maritime et 2 à l’étude sur le Bassin d’Arcachon et la Côte Basque
  • l’érosion est à l’origine de 7 stratégies locales de gestion de la bande côtière

Face à ces risques, nous avons développé des outils régionaux opérationnels avec l’Observatoire de la Côte Aquitaine, avec le GIP littoral mais aussi avec une articulation importante avec le monde de la recherche.

Cependant, sur ces questions, nous avons, en Nouvelle Aquitaine, une attente extrêmement forte en matière de solutions législatives face à l’inéluctable nécessité de recomposer nos espaces littoraux. Tout le monde connait le cas du Signal à Soulac-sur-Mer. On peut évoquer également la commune de Biscarrosse qui, pas plus tard que cet été, a elle aussi été concernée par deux arrêtés de péril frappant un bâtiment collectif à usage d’habitation et partiellement un hôtel, en bord de plage.

Je m’adresse donc aux parlementaires et notamment à Stéphane Buchou, qui s’est vu confier le soin de travailler sur ces questions. Nous sommes satisfaits de sa venue dans les Landes et en Gironde ces derniers mois. C’était pour moi l’occasion d’évoquer ces sujets et de lui indiquer que l’attente est forte, nous avons besoin d’outils pour indemniser et organiser dans le temps le repli des biens menacés par l’érosion pour éviter que les cas que je citais avant ne se multiplient sur notre littoral.

Mais, pour autant, je veux tout de même vous mettre en garde, pour que, à l’occasion de ce futur projet ou proposition de loi, vous ne cédiez pas à la facilité de fragiliser la loi littorale, comme cela a été le cas lors de l’examen de la loi élan.

Parce que, au-delà des risques naturels et du dérèglement climatique, nous ne pouvons plus ignorer que l’effondrement de la biodiversité est l’autre urgence que nous devons absolument prendre en considération. 80 % des insectes ont disparu en Europe depuis les années 80 et dans notre région, en à peine 15 ans, un tiers des oiseaux ont disparu. Sur le littoral de Nouvelle Aquitaine, ces 30 dernières années, l’étalement urbain a progressé de 43% au détriment des espaces naturels, agricoles ou forestiers.

Par conséquent, l’arrêt de la destruction de ces espaces, indispensables à la biodiversité ainsi qu’à la lutte contre le dérèglement climatique, est un impératif pour nos politiques publiques.

En matière de biodiversité marine à la base des activités économiques que j’évoquais précédemment, nous avons à travailler sur la qualité de nos eaux qui réceptionnent les résidus de contaminants chimiques, médicamenteux, bactériologiques et autres pesticides ou perturbateurs endocriniens rejetés dans nos eaux littorales par émissaires, nos rivières ou nos fleuves. Nous devons faire des efforts pour faire émerger une plaisance propre en matière d’antifooling ou de HAP pour avoir une approche globale et reconquérir la qualité de nos eaux littorales.

Enfin, nous devons également prendre en considération la dimension humaine et garder en mémoire les manifestations anti-tourisme de masse qui ont pu émerger en Espagne (à Barcelone ou à San Sébastien) mais aussi, dans une certaine mesure, en France notamment au Pays Basque ou à Bordeaux avec des tensions sur le logement. Ces manifestations mettent en lumière de réelles difficultés pour les habitants des territoires soumis à la pression touristique, en particulier pour les plus modestes qui ont de plus en plus de mal à se loger correctement.

Cette problématique, comme celles de la préservation de la nature, méritent que nous nous réinterrogions sur le tourisme de masse auquel nous sommes confrontés.

Je me réjouis donc de voir tous ces sujets abordés lors de ces journées d’étude et je vous souhaite de fructueux échanges ambitieux et innovants à la hauteur des enjeux face auxquels nos littoraux sont en première ligne.

Je vous souhaite la bienvenue en Nouvelle-Aquitaine. Merci de votre présence ici à Bordeaux et bons travaux.