Protocole d’accord pour une agriculture durable dans le territoire du bassin Sèvre niortaise-Mignon

Intervention de Nicolas Gamache en séance plénière du 17 décembre 2018

Monsieur le Président, cher·e·s collègues,

Nous avons à délibérer pour la proposition 14 bis qui nous engage sur deux objets. Le premier porte sur la signature d’un protocole d’accord autour de la question de retenues de substitution, à savoir 16 bassines, le second, incidemment notée « d’éventualité » dans cette délibération est celle du financement qui suivra, à savoir 25 % du montant total pour notre collectivité, même si c’est en grande partie par la mobilisation de fonds européens.

Je relèverai tout d’abord 3 questions :

  • La première est celle du consensus, un point sur lequel vous aviez vous-même pris parti, celui d’un consensus total sur le territoire pour donner suite à ce projet. Or, il s’avère qu’aujourd’hui ce n’est pas le cas, un grand nombre d’acteurs rejetant ce protocole : l’APIEE, le GODS 79, la confédération paysanne, au moins une des mairies concernée, ainsi que de nombreuses autres structures et les citoyens qui n’étaient pas conviés dans le comité mis en place par la Préfète.
    Je m’interroge d’ailleurs sur les coups de fil et vous alerte sur les pressions que certains acteurs subissent. Par exemple, Mougon renvoie ce soir à la demande de la Préfète, alors que le conseil municipal s’est prononcé contre ! Le consensus obtenu à la pression n’est pas un consensus et cela laissera des traces.
  • Deuxième point : celui de projet de territoire. Ce protocole ne peut être assimilé à un projet de territoire, c’est un protocole autour des terres d’irrigation sur certaines exploitations et qui omet une grande partie du territoire où se situe l’implantation des bassines mais aussi, au-delà, je pense aux communes de Charente-Maritime où le Mignon suit son cours et où les communes n’ont pas été mises autour de la table.
  • Le troisième point concerne la sortie des pesticides : aucun objectif chiffré de sortie des pesticides, juste une « réduction » à discrétion des agriculteurs !

Nous ne sommes pas contre l’irrigation, nous ne sommes pas contre des bassines dans l’absolu, comme l’a dit notre co-présidente de groupe, nous n’avons pas de dogmatisme dans notre démarche.

Nous aimons l’agriculture et les agriculteurs et les soutenons, mais pas à n’importe quel prix, pas n’importe comment et pas pour n’importe quoi. D’ailleurs les agriculteurs sont loin d’être tous d’accord avec ce protocole !

C’est bien la question de transition agricole du territoire dont il est fait mention dans ce protocole, or le problème qui se pose est celui de l’eau, pas de l’agriculture. Nous prendrions le risque de perturber le grand cycle de l’eau sur le bassin versant présent, entre la rivière et l’estuaire, avec toute les conséquences sur la continuité écologique

L’eau est un bien commun, comme aimait à le rappeler cette grande militante de la justice sociale qu’était Danielle Mitterrand.

Les scientifiques travaillent sur ces questions, nous avons vu les rapports, notamment Acclimaterra, censés nous ouvrir les yeux sur les enjeux des travaux en cours.

Je pense aux chercheurs du CNRS de Chizé qui montrent que le modèle agricole a été transformé et que l’on peut faire de l’agro-écologie sans pour autant avoir recours à des infrastructures gigantesque, comme celle des bassines prévues. Nous sommes dans le cadre d’une vraie transition écologique et une vraie transition agricole : écoutons les scientifiques, laissons-leur la parole !

Notre co-présidente de groupe a aussi évoqué, dans son intervention liminaire, l’inégalité d’un traitement qui favorise les « agro-managers » qui vont concentrer les aides, alors même que la grande partie de nos éleveurs connait des difficultés majeures, notamment par la perte de l’ICHN.  Comment ne pas entendre le désarroi dans nos campagnes de ces agriculteurs alors même que l’on se prépare à verser des millions d’euros à un petit nombre d’entre eux ?

Je terminerai par une question : comment envisagez-vous les prochaines demandes puisque ces 16 bassines vont faire jurisprudence et entraîner des projets par dizaines ?

Enfin, je marque un point de vigilance autour duquel je vous invite tous, chers collègues à réfléchir : ce protocole porte des risques de non-conformité au regard de notre règlement d’intervention et je vous prie de mesurer toutes les conséquences possibles si nous venions à délibérer sur un sujet qui pourra se retrouver à défaut au regard de la loi puisque non compatible avec le cadre que nous avons pu fixer auparavant…

Je vous le dis : ce n’est pas parce qu’on améliore un mauvais projet qu’il devient bon.

Attendons que les assises nationales de l’eau sur l’adaptation au changement climatique rendent leurs conclusions !

Nous voterons contre cette délibération.

Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]