Propos introductifs de Jean-Louis Pagès : réparons le monde !
Séance plénière du 3 juillet 2020
Monsieur le Président, cher.e.s collègues,
Nous sommes particulièrement heureux des résultats des municipales de dimanche. Ce ne sont pas des vaguelettes vertes qui clapotent, ce n’est pas non plus un raz-de-marée du fait de l’énorme attention, mais c’est une vraie marée verte qui monte et la conjonction avec le reflux prévisible de économie n’est pas un hasard : c’est le résultat de la crise écologique qui est de même coup une crise sociale.
Vers des territoires résilients
Lorsque la société vacille, que des pans entiers de l’industrie sont menacés, que des plans de licenciements comme ceux de Dassault ou Airbus sont annoncés, on comprend alors que la résilience des territoires, concept que jusqu’à présent nous étions seuls à promouvoir, devient le fil rouge indispensable.
Dans le paquet des mesures urgentes pour une transition écologique et un rebond social qui est proposé à notre vote les solutions écologistes prédominent : circuits courts, alimentation saine, autonomie énergétique, construction durable et écologique, traitement et recyclage des déchets, renforcement du tissu associatif et de l’ESS dont on reconnaît l’immense intérêt social, territoire zéro chômeur de longue durée.
Ces mesures prises dans l’urgence avec des moyens limités pour préparer nos territoires à une transition écologique accélérée sont celles que nous réclamons depuis si longtemps et qu’on aurait pu mettre en œuvre méthodiquement avec des moyens adéquats au niveau de chaque collectivité : c’est ce à quoi Pierre Hurmic ou Léonore Moncond’huy vont s’atteler sur leur territoire, comme les autres maires écologistes qui sont maintenant en responsabilité.
Des élu.e.s résolument responsables
Les écologistes furent traités souvent ici d’irresponsables alors que ceux qui gèrent des villes comme Eric Piolle à Grenoble, ou Clément Puech-Rossignol à Bégles ont été reconduits de façon écrasante par leurs administrés, qui ne les voient pas du tout comme des punitifs ou des sectaires : les maires verts ne sont pas les khmers verts que vocifère l’extrême-droite, ce sont des gestionnaires prévoyants et surtout responsables.
Mes chers collègues, c’est l’irresponsabilité qui nous a conduit où nous en sommes, avec les conditions de la vie même qui sont mises en danger pour demain et les personnes massivement au chômage aujourd’hui : l’irresponsabilité de croire qu’on peut augmenter indéfiniment le trafic aérien et ses milliards de passagers qui sillonnent la planète, continuer l’extraction des énergies fossiles, encourager l’agriculture intensive agrochimique, pousser à une mondialisation effrénée des échanges en sacrifiant les productions locales, poursuivre la destruction des terres arables et des espèces animales et encourager l’accaparement et la pollution de l’eau.
Ce sont ces politiques irresponsables qui nous amènent au bord du chaos social, avec des filières industrielles entières menacées avec des licenciements en cascade, comme dans l’aéronautique aujourd’hui, un dérèglement climatique qui s’emballe et dont notre région va beaucoup souffrir.
Réparer le monde
Les maires écologistes et leurs alliés vont donc commencer patiemment à s’atteler à cette « réparation du monde », avec humilité et depuis leur commune, et nous devrons en faire autant à l’échelon régional. Le chemin est long, d’autant que la résistance des productivistes de tous bords s’organise ce qui montre que la vieille césure du siècle dernier entre gauche et droite n’est plus du tout pertinente, et que dans les EPCI de villes fraîchement conquises par l’écologie, des fronts anti écolos se structurent pour que rien surtout ne change et faire triompher les lobbies des industries carbonées.
Les vrais combats ne font donc que commencer et nous ne reculerons pas devant l’urgence à agir qui nous incombe. Car si nous sommes unis nous avons extraordinaires atouts pour y parvenir.
Atout de nouveaux personnels politiques, comme notre jeune collègue Léonore, passée dans le ciel de cette mandature comme une éblouissante comète, de celles qui inspirent et servent de guide pour conduire au berceau d’une nouvelle ère : l’ère des écologistes.
Nous sommes profondément heureux que Poitiers collectif ait convaincu les Poitevines et les Poitevins de faire confiance à la fougue et la générosité de sa jeunesse pour enfin changer la ville et la vie de ses habitants. Si la remise en question permanente de ses convictions face au poids des conservatismes, et l’audace de proposer une alternative désirable est paraît-il une caractéristique de la jeunesse, si le désir de coopérer en harmonie plutôt que de contraindre par violence est le cliché sexiste du féminin, si la volonté opiniâtre de protéger le vivant demeure le souci de l’écologie, eh bien en fait, chacun d’entre nous peut prendre modèle sur Léonore Moncond’huy et c’est cela qui en fait une source d’inspiration quel que soit notre âge, notre sexe ou nos origines politiques.
L’autre atout qui nous donne tant d’espoir c’est la prise de conscience individuelle qui se mue en volonté collective, comme la Convention citoyenne pour le climat nous le fait découvrir. Mes chers collègues c’est simple, tirez au sort 150 citoyens, faites-leur rencontrer des scientifiques et des experts pour qu’ils comprennent les enjeux économiques et climatiques et travailler des solutions, et vous obtenez 150 écologistes déterminés et enthousiastes qui s’organisent en association militante de l’écologie.
Ces citoyens de tous horizons sont-ils des écologistes fanatisés manipulés par EELV quand ils proposent, je cite : d’ « organiser progressivement la fin du trafic aérien sur les vols intérieurs d’ici 2025, uniquement sur les lignes où il existe une alternative bas carbone satisfaisante en prix et en temps (sur un trajet de moins de 4h) ou d’interdire la construction de nouveaux aéroports et l’extension des aéroports existants » ?
Non, ce sont les forces vives de l’avenir qui nous interpellent, Monsieur le président, mes chers collègues, c’est à nous tous, collectivement, d’y répondre.
Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]