Intervention relative à la Cité du Vin

Par Martine Alcorta  – Intervention en commission permanente du 6 juin 2016.

Cher président, chers collègues,

Les aides de la Région qui atteignent des sommes considérables, comme celles concernant la Cité du Vin, méritent une attention particulière. On ne peut pas d’un côté dire que nous devons faire des économies et ne pas avoir une analyse attentive pour les projets que nous finançons à hauteur de plus de 500 000 euros.

En ce qui concerne la Cité du Vin nous en sommes à la somme de 5,5 millions d’euros.

Incontestablement, c’est une aide qui concerne un secteur d’activité très implanté, à la fois d’un point de vue culturel et économique dans notre région.
Notre propos ne se résumera pas à considérer l’opportunité ou pas d’un tel projet. Il s’agit pour nous, élu-es régionaux, de nous demander si une aide publique, d’un montant aussi élevé (5,5 millions d’euros), se justifie ou non. Est-elle opportune au regard de ce que doivent être des politiques publiques ?

Notre analyse portera sur 6 points :

  • La première question qui se pose est le rayonnement touristique de ce centre d’un point de vue régional. Il nous semble très centré sur le territoire métropolitain,
    Même s’il a une vocation internationale, il apportera sans doute une valeur ajoutée à la politique touristique de la ville de Bordeaux. Mais au vu du rayonnement limité sur le territoire régional, notre contribution n’est-elle pas démesurée ?
  • La deuxième question est celle de l’effet levier, au vu du nombre de mécènes qui ont contribué à la construction de cet établissement, notre apport a-t-il été vraiment décisif, rien de très évident ;
  • La troisième question est celle du rayonnement économique de ce centre culturel. Va-t-il apporter une plus-value aux nombreux petits viticulteurs de la région qui représentent une quantité non négligeable de la production viticole régionale ? Les intéressés eux-mêmes le contestent ;
  • La quatrième question est celle de la promotion d’une agriculture chimique loin du nécessaire virage agroécologique, quel part est donnée à cette viticulture exempte de phytosanitaires et soucieuse de préserver environnement ?
  • La cinquième question est celle du bilan carbone d’un tel bâtiment. Peut-on aujourd’hui bâtir sans tenir compte de cette donnée, peut-on mettre de l’argent public dans des bâtiments qui ne respecteront pas le protocole de la COP 21 ? Éclairage spectaculaire, nous nous posons des questions ;
  • Pour terminer, nous sommes bien entendu conscients qu’il s’agit d’investissement et non de fonctionnement, mais quid de la viabilité financière à terme de ce type de musée ? Au-delà de l’engouement des premiers mois ou premières années, la Cité du Vin sera-t-elle en mesure de conserver son attractivité ? Ou devra-t-elle se tourner vers les collectivités publiques, par l’intermédiaire d’expositions temporaires qui permettent en réalité de se faire financer des coûts importants de fonctionnement par l’argent public ?

Notre région possède déjà une attractivité internationale au vu de ses offres touristiques dans le domaine de la viticulture qui sont nombreuses et diversifiées, visites et dégustations, promenades à pied ou à vélo dans le vignoble, est-ce vraiment raisonnable de penser qu’en mettant une telle somme dans cette Cité du Vin, nous allons donner une plus-value régionale à cette attractivité ? Nous en doutons.

Par ailleurs, nous restons très circonspects vis à vis de la difficile structuration de cette cité dans le maillage urbain, au profit d’un pôle touristique sans insertion dans le bassin de vie au niveau des résidences et faute de réelles connections au niveau des transports. Ne doit-on pas craindre de cette métropolisation d’inévitables bouchons supplémentaires ?

Pour ces raisons nous voterons contre cette délibération.

En revanche, nous voulons apporter toute notre approbation aux dossiers qui permettent le développement de l’activité touristique dans notre grande région, que ce soit pour rénover l’offre d’hébergements, notamment des hébergements collectifs à caractère social comme le dossier concernant l’association des Francas ou les dossiers relatifs à la gestion de sites touristiques compatibles avec le respect de l’environnement ou au tourisme social.

Même si ces aides atteignent des sommes qui n’ont rien de comparables avec celles que nous investissons dans un projet comme la Cité du Vin, elles jouent en revanche pleinement leurs rôles d’effet levier, car ce sont des projets qui sans l’aide complémentaire de la Région, ne verraient pas le jour pour la plupart.

Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]