Intervention de Vital Baude : convention de partenariat Néo Terra avec la Coopération agricole

Monsieur le président, cher.e.s collègues,
On ne peut pas être contre le fait que la coopération agricole ré-interroge sa raison d’être et engage une transformation profonde car l’agriculture et l’alimentation sont face à des attentes sociétales et à des enjeux majeurs : socio-économiques, environnementaux et climatiques. La coopération doit reconsidérer ses services et ses missions.
Plusieurs études en enquêtes sérieuses sur les coopératives agricoles ont montré comment, depuis les années 1990, elles ont peu à peu dérivé vers un modèle plus proche des sociétés capitalistiques que de l’économie sociale et solidaire, modèle qui était pourtant à l’origine de leur création.
Il y a eu parfois des dérives, dans lesquelles elles ont entraîné une grande partie du monde agricole : course aux bas coûts aux dépens de la valeur ajoutée et des revenus des agriculteurs, productivisme aux dépens de l’environnement, politique d’exportation plutôt que développement des circuits courts.
Cette convention Néoterra pourrait donc être un grand pas vers un changement du modèle agricole. Avec des choses qui vont dans le bon sens : la formation, la promotion de l’agriculture biologique, le soutien à la diversification des cultures et à l’autonomie protéique, la préservation de la biodiversité ou l’amélioration de la bien-traitante animale.
Mais lorsqu’on entre dans les détails de cette convention, on trouve aussi beaucoup d’éléments qui font craindre une politique des petits pas.
Certaines actions prévues sont même préoccupantes :

  • la promotion de l’agriculture de précision. C’est une des marottes bien connues des tenants de l’agriculture conventionnelle et qui cherchent à la perpétuer. Sans entrer ici dans les détails sur le volet environnemental, je vous invite à prendre connaissance de l’analyse de la fondation Nicolas Hulot sur cette agriculture de précision. Elle va, entre autres, contribuer à maintenir le surendettement des agriculteurs et à continuer à détruire l’emploi agricole.
  • On trouve aussi dans cette convention, au prétexte de l’atténuation du changement climatique, la mise en avant des CIVE pour les méthaniseurs, celle des biocarburants, de la monétisation du stockage carbone ou encore des réserves de stockage pour l’irrigation… Toutes choses qui au contraire de résoudre les problèmes à venir contribueront à les aggraver
  • Quant à la promotion de la certification HVE, elle est placée avant la promotion du bio dans cette convention, ce qui n’est pas anodin. Pour résumer : le HVE c’est ralentir dans la mauvaise direction quand il faudrait en changer. L’affaire récente sur les taux élevés de pesticides dans les vins de Bordeaux estampillés HVE l’a montré. Nous nous inquiétons que la Région fasse largement la promotion du HVE car il ne permettra pas d’atteindre l’objectif de sortie des pesticides

Chers collègues, nous souhaitons vivement que les coopératives agricoles impulsent un vrai changement, pour le bénéfice de leurs adhérents et de la société dans son ensemble. Mais les points que je viens de souligner, qui ne sont pas cohérents avec les ambitions affichées, nous conduisent à nous abstenir sur cette délibération.
Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]