Feuille de route de la filière aéronautique spatial défense, nommé plan Maryse Bastié 2022

Intervention de Jean-louis Pagès en séance plénière du 4 mars 2019

Monsieur le Président, cher·e·s collègues,

Le patronage même posthume de Maryse Bastié, limougeaude éminente, issue d’une famille ouvrière et pionnière féministe de l’aviation semble bien alléchant pour cette feuille de route qui promet pêle-mêle l’ambition, le succès, le talent le dynamisme et bien sûr l’excellence.

Avec une telle profusion affichée de poncifs les écologistes étaient sûrs de pas y trouver beaucoup d’originalité : attractivité, performance, réinvention, disruptif, expérience passager (on ne voyage plus, on vit des « expériences passager »).

Tous les signifiants habituels sont présents pour un projet structuré et ambitieux, mais désespérément bloqué sur une vision dépassée du progrès humain, et l’invocation de Maryse Bastié prend alors tout son sens : c’est une vision du début du XXe siècle, où on pensait que l’expansion du transport aérien était une chance et que son développement était intiment lié à ses applications militaires.

Or nous savons, et nous l’avons répété à plusieurs reprises dans cette assemblée et nous le répéterons encore pour la délibération Clean Sky, la croissance du transport aérien va aggraver davantage le dérèglement climatique, l’aérien étant le secteur d’activités où les émissions de gaz à effet de serre progressent le plus vite.

Les études qui sont citées pour l’aéronef de demain à énergie réduite ne vont que permettre par effet rebond à accroître encore plus les voyages aériens, aggraver la pollution et augmenter les tailles des mégapoles reliées ainsi entre elles et engendrant encore plus de trafic. On y parle même de mobilité aérienne urbaine, afin de remplir les villes d’un cauchemar de drones la survolant sans trêve. C’est un cercle vicieux qui détruit les territoires et amplifie le réchauffement climatique.

 

Comme l’industrie nucléaire, la tare fondamentale des ces industries aérospatiales est bien sûr le militaire, et le concept ASD qui veut renforcer la dualité industrielle civil/militaire.

Eh bien chers collègues nous ne croyons pas à la nécessite de développer des produits dont la destination est d’aider les États de détruire des populations : notre pays est le troisième exportateur d’armes au monde vers des pays nos principaux clients comme l’Arabie Saoudite (contrat Donas) utilise nos produits pour décimer les civils du Yémen.

Dans cette feuille de route, route que les écologistes n’ont pas envie d’emprunter, manque cruellement une réflexion sur l’avenir d’une industrie vouée à la destruction de notre environnement dans ses applications civiles et des humains dans ces applications militaires, ce qui explique la cohérence de ces filières ASD.

Mais ne faut-il plutôt anticiper les évolutions à venir plutôt que d’accélérer le mouvement qui nous conduit au désastre ? Songer à la reconversion de ces filières vers des activités de production décarbonées ? Offrir un avenir possibles à leurs salariés ?

Nous voterons contre cette délibération.

Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]