Feuille de route chimie matériaux

Intervention de Lionel Frel en séance plénière du 4 mars 2019

Monsieur le Président, cher·e·s collègues,

La lecture de cette délibération m’a immédiatement fait penser à un viticulteur bergeracois, Gérard. Celui-ci m’a expliqué que le bio, dans le temps, il s’en foutait royalement. Et puis sa jeune fille est tombée malade, le diagnostic est arrivé : cancer.  Les médecins ont expliqué que ce type de cancer était très probablement dû aux produits chimiques utilisés par son père sur l’exploitation. Sa fille a fini par guérir, au terme de plusieurs années de lutte. Depuis, Gérard est passé à la bio.

La délibération proposée aujourd’hui méritait d’être beaucoup plus ambitieuse : plutôt qu’accompagner les vieilles pratiques éculées des vieilles firmes de la chimie, le conseil régional aurait pu, aurait dû, aller plus loin, bien plus loin dans l’accompagnement de ce secteur industriel si particulier.

La chimie est capable du meilleur, et trop souvent du pire. Le meilleur, quand elle invente certains médicaments apportant un réel mieux être.

Le pire, quand elle invente des armes chimiques tels que l’ypérite, le fameux gaz moutarde utilisé il y a un peu plus d’un siècle, ou l’agent orange rendu tristement célèbre lors de guerres plus récentes, le gaz sarin, et bien d’autres armes de destructions massives.

Le pire, quand elle inonde nos champs de pesticides et d’autres produits pudiquement appelé phytosanitaires, mais qui font crever nos abeilles, pourrissent nos sols et l’eau que nous buvons, rend malade nos enfants qui jouent dans les cours de récréation d’écoles trop proches des vignes ou de champs de maïs comme à Villeneuve de Blaye en 2014. Le pire, quand elle empoisonne d’abord nos agriculteurs comme Paul François, ce courageux agriculteur charentais qui attaque Monsanto en justice avec son association PhytoVictimes.

Le pire, quand la chimie développe les nanotechnologies, sans rechercher vraiment si ces matériaux, dits avancés, sont sans danger, sans respecter le principe de précaution, au risque d’empoisonner nos corps. Le scandale de l’amiante, qu’on a présenté tant d’années comme sans danger, doit nous inviter à la prudence.

Le pire enfin, quand elle refuse la transparence, comme par exemple, les mesures des polluants issus de bassins industriels, comme celui de Lacq. Et pourtant dans son usine de Lacq, Sanofi a pendant des années, pollué 7 000 fois plus que la norme autorisée !

Cette délibération aurait pu, aurait dû, être celle qui allait orienter le secteur industriel de la chimie vers le meilleur. Il est grand temps de dépasser le simple ripolinage de politiques publiques du passé, grand temps de dépasser le greenwashing d’entreprises irresponsables.
Il nous faut passer à la chimie verte, il nous faut engager les entreprises sur la voie de l’écologie industrielle. Il nous faut protéger nos enfants, nos populations.
Il nous faut aider les entreprises qui ont réellement mis au cœur de leur projet la responsabilité sociale et environnementale et les  engager dans cette voie d’une industrie chimique plus respectueuse de notre planète si précieuse et de ses habitants.

C’était le sens de notre demande de retrait de cette délibération avant la plénière d’aujourd’hui, afin de pouvoir la  retravailler sérieusement, lui donner une orientation bien plus innovante et moderne.

Et puis, il me vient cette réflexion que Gérard, le viticulteur bergeracois, m’a faite tout récemment : « depuis que l’entreprise chimique de pharmacie Bayer a racheté Monsanto, c’est le même qui nous fout le cancer, et qui nous le soigne ».

Alors, monsieur le Président, chers collègues, avec le mouvement Stop Glyphosate ou le mouvement des Coquelicots, avec les Marcheurs pour le Climat, avec les plus de 2 millions de signataires de la pétition « l’Affaire du Siècle »,  avec les militants environnementalistes et écologistes, vous l’avez compris, le groupe EELV votera contre cette délibération et vous appelle à voter contre.

Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]