Propos introductifs de Léonore Moncond’huy : après la crise, pas de retour à l’anormal !

Séance plénière du 29 mai 2020
Monsieur le Président, cher.e.s collègues,
Je tiens tout d’abord à exprimer toute la tristesse de notre groupe, suite à la disparition tragique de Laurent Lenoir. Un élu reconnu pour son engagement intègre et généreux, dont je peux témoigner notamment dans le cadre de nos travaux communs sur les emplois associatifs.
Cette séance plénière est la première à l’heure du déconfinement. C’est le moment où l’on entrevoit petit à petit le retour du « monde d’avant », la tentation du retour à la normale…
Je me réjouis du retour à un fonctionnement démocratique de plus en plus normal.
C’est aussi une plénière où nous voyons aussi les premiers fruits du plan d’urgence que nous avions voté à l’unanimité, et je me réjouis en particulier des formes de coopération qui ont naturellement émergé avec cette crise, notamment autour des aides économiques construites et mises en œuvre avec les acteurs des différents secteurs de la Région, et les EPCI. Ces modalités de travail, partenariales, me semblent aller dans le bon sens et doivent être poursuivies, renforcées.

Mais, alors que nous commençons à pouvoir prendre un peu de recul sur cette crise, il y a un chiffre qui m’a marquée. Si on veut respecter l’accord de Paris, c’est-à-dire le strict minimum pour réguler le changement climatique, il faudrait l’équivalent d’un « confinement » par an. Cela donne une idée de l’ampleur du changement de modèle que nous devons engager ! Et inversement, ça donne une idée de l’ampleur des excès du monde que nous considérions comme  « normal ».

Je le dis pour le climat, mais c’est aussi vrai pour les secteurs qui ont montré leur souffrance : les soignants, qui sont d’ailleurs majoritairement des soignantes, car les femmes ne font pas que les repas, eux-mêmes utilisent ce slogan, « pas de retour à l’anormal », pour dénoncer la pression quotidienne, mise ne lumière par le COVID, mais présente au quotidien.
Le retour à la normale, ce n’est donc pas revenir au monde tel qu’il était immédiatement avant le COVID. C’est saisir l’occasion pour le faire redescendre, progressivement, vers un mode de vie, de consommation, plus équilibré, respectueux des ressources que nous avons. Saisissons l’occasion pour rendre le monde un peu meilleur qu’il ne l’était avant le COVID.
Il est évident que nous ne souhaitons pas subir, continuellement, une crise nous imposant un tel bouleversement de nos vies. Mais il est tout aussi évident que notre système, en l’état actuel, n’est pas durable, et qu’il ne peut pas être changé qu’à la marge.

L’anticipation n’est plus une option

Le problème est surtout que, ce qu’on a connu pendant le confinement, ce n’est pas une diminution progressive et organisée de l’impact de notre mode de vie. On a tout subi ! Et c’est justement ce qu’il va se passer si on laisse encore prendre de l’ampleur le modèle actuel, qui va générer de plus en plus de crises économiques, climatiques, sanitaires, sociales…
Soit, on n’anticipe pas, et on subit les crises, soit, on s’organise. C’est la résilience, un terme désormais couramment employé, mais qui revêt tout son sens dans les décisions que nous devrons prendre dans les mois à venir pour nous organiser, pour ne plus subir, mais anticiper.
On s’organise… avec des moyens réduits. Les Régions, de par les aides exceptionnelles qu’elles ont su mobiliser, mais aussi par la perte de recettes engendrée par la situation, vont, comme tous les Françaises, Français, comme toutes les collectivités, devoir affronter un important problème budgétaire, en plus de devoir contribuer à amortir la crise économique.
Nous l’entrevoyons : une situation contrainte, qui implique de faire des choix, de retrouver le sens des priorités.
Alors, aidons les habitantes et habitants de notre Région à revenir à ce qui est vraiment normal, et compte vraiment dans nos vies : aider chacun à avoir un emploi, sous une forme la plus sécurisante possible – et la crise a montré combien l’ubérisation par exemple pouvait avoir des conséquences dramatiques sur des foyers qui ont perdu un ou deux emplois dans les derniers mois. Retrouver le plaisir des vacances, d’une éducation au plein air pour nos enfants, et découvrir ou redécouvrir la Région – notre plan tourisme apporte des réponses immédiates, pistes pour des solutions plus durables.
Et continuons, accélérons ce qui va dans le bon sens : nous votons le Plan régional pour l’efficacité énergétique (PREE), un travail porté de de longue haleine par Françoise Coutant qui tombe à point nommé. Investir dans l’efficacité énergétique des bâtiments, coordonner nos efforts en la matière, c’est à la fois soutenir la relance économique, et construire concrètement un monde plus écologique, et plus juste pour les plus précaires.
Notre groupe l’écrivait récemment dans une tribune : « La période est historique et l’opportunité rare de réorienter les soutiens de la Région, avec des conditions permettant d’appliquer sans tergiverser les principes de Neoterra pour un plan de relance durable et soutenable ».
Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]