Intervention de Maryse Combres en séance plénière du 16 décembre 2019

Intervention de Maryse Combres en séance plénière du 16 décembre 2019
Monsieur le Président, cher.e.s collègues,

Plus de six mois se sont écoulés depuis le 6 mai où nous avons pour la première fois débattu du Sraddet au cours duquel le groupe écologiste avait présenté sa position. Le schéma nous revient aujourd’hui suite à la conclusion de l’enquête publique menée sur tout le territoire néo-aquitain, et enrichi de certaines modifications qui en sont le reflet.

Lors de cette plénière Sraddet nous précisions alors « que ce n’était pour nous qu’une première étape, nous savions que la nécessité aveuglante de précipiter la transition allait s’imposer à tous, et qu’il paraîtrait même un peu timoré dans quelques années ».

Eh bien, mes chers collègues, il le paraît déjà aujourd’hui, quelques mois plus tard, alors que les menaces liées au dérèglement climatique se précisent et avec elle la prise de conscience de nos concitoyens. Il n’est pas une plénière qui ne soit ponctuée par l’actualité de catastrophes climatiques, des sécheresses de l’été aux inondations catastrophiques de novembre, d’hier et d’aujourd’hui comme le subissent actuellement divers départements Néo-aquitains ; et toutes ces menaces pointent vers des axes majeurs pris en compte par le Sraddet : l’artificialisation des sols et leur imperméabilisation, la maîtrise de la ressource en eau trop abondante l’hiver et rare l’été, et le dérèglement climatique dû aux émissions des gaz à effet de serre.

Ce Sraddet paraît aussi bien peu ambitieux à la lumière de la nouvelle feuille de route NeoTerra, qui fixe des objectifs de transition écologique à notre Région pour laquelle le groupe des écologistes se sont mobilisés depuis le Manifeste pour le Climat qu’ils avaient proposé dès 2018.

 

Une ambition revue à la baisse

Le géographe Xavier Desjardins dans un passionnant article de la Gazette des communes, montre que le Sraddet est le marqueur des orientations politiques des Régions au-delà de leur rôle simplement technique spécifié par les textes. Et d’ailleurs, en comparant les différents Sraddet élaborés par les Régions, on se rend compte que parmi celles qui prennent une trajectoire ambitieuse énergie-climat, avec des objectifs nombreux, précis et bien documentés sont, selon l’analyse de la revue du Monde de l’énergie, notre Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie et Centre Val de Loire. Trois régions où des écologistes participent à l’exécutif.

Nous nous sommes abstenus lors du vote du mois de mai, en dépit de l’énorme travail que nous avons réalisé avec l’infatigable Laurence Rouède pour faire évoluer ce document, pour les raisons que nous avions développé alors et sur lesquelles il n’est pas utile de revenir :

  • maintien de la référence à la GPSO ;
  • encouragement au renforcement des activités de transports aériens ;
  • absence de garantie sur la gouvernance de la gestion de l’eau.

Rien n’a changé sinon en pire, puisque sous la pression des collectivités, les ambitions du Sraddet ont été revues à la baisse.

Nous pouvons prendre l’exemple de l’artificialisation, qui est emblématique pour un schéma qui va s’imposer aux futurs SCOT et PLU, mais aussi pour son enjeu de transition écologique : tant au titre de l’émission des gaz à effet de serre que pour la biodiversité. Chacun a désormais fini par comprendre dans cette assemblée que l’artificialisation due à l’étalement urbain tant de zones périphériques que de routes pour les desservir porte atteinte au climat, comme les écologistes s’échinent à le répéter depuis des décennies. Mais l’artificialisation menace aussi la biodiversité, non seulement pourrait-on dire par élimination directe (comme la déviation du Taillan qui massacre des zones abritant des espèces rares et protégées, ou celle de Beynac qui dénaturait un site remarquable) mais plus encore de façon indirecte en cloisonnant les espaces restés naturels et bloquant la migration des espèces.

Si nous considérons l’objectif 31, qui fixe les règles présidant au calcul de 50% de baisse de l’artificialisation, il est prévu de ne pas faire entrer dans les calculs les grands projets, souvent qualifiés par les écologistes de GPI, grands projets inutiles, au prétexte qu’une collectivité locale ne peut être tenue responsable du passage sur son territoire d’une autoroute ou d’une ligne LGV dont elle va subir les nuisances sans en retirer quelque avantage de desserte que ce soit. Pour discriminer ces projets échappant aux calculs de taux d’artificialisation, il est proposé de ne retenir que ceux justiciables de la CNDP : or il suffit que le coût des bâtiments et infrastructures des équipements industriels soit supérieur à 300 millions d’euros pour que maître d’ouvrage soit obligé de déclencher la saisine de la Commission : Chambord Country Club, l’Extension du Parc Disney, Parc Heroic Land, ou le complexe du golf de Tosse ressortissent tous à ces conditions, comme indiqué sur les rapports d’activité de la CNDP.

Pour continuer sur cet objectif 27, nous avions bataillé pour que les réflexions sur l’infrastructure, l’optimisation de l’existant soient favorisées avant d’envisager toute infrastructure nouvelle. Mais ce paragraphe se voit doté d’un amendement qui en est bien plutôt … un démenti. Le fait d’ajouter que « si l’optimisation de l’existant est à privilégier, la possibilité d’étudier de nouvelles infrastructures répondant aux besoins de mobilité (individuelle, collective, économique…) n’est pas à exclure de même que l’appréhension de leurs modalités de financement » inverse complètement la logique du texte en le subvertissant. Et pour illustrer ce complet retournement, il est mêmes précisé que « Dans ce cadre s’intègre la finalisation de la mise à 2×3 voies de la rocade (de Bordeaux) et de ses continuités routières et l’identification des compléments routiers pour assurer le bon fonctionnement des territoires. »

Où est passé NeoTerra et son ambition de juguler la politique du tout-automobile ? Et ne sait-on pas que construire une route c’est automatiquement augmenter le trafic de voitures et concurrencer les modes de transport collectifs ?

Nous demandons ainsi de rétablir la formulation originelle de cet objectif afin d’en préserver l’esprit, et de confirmer les ambitions de notre feuille de route régionale NeoTerra. C’est l’objet de l’amendement que nous demandons de bien vouloir mettre au vote, avant d’exprimer notre position sur le Sraddet lui-même.

Je vous remercie.

[Seul le prononcé fait foi]

Notre amendement a été rejeté.

Amendements aux ajustements des documents SRADDET publié par eelvcrnouvelleaquitaine