Projet d’irrigation du lac de Caussade : conditionnons l’argent public au changement de modèle agricole
COMMUNIQUE DE PRESSE
25 septembre 2018
Les élu·e·s écologistes de la Région Nouvelle-Aquitaine sont opposés à la création d’une retenue d’eau dite du « lac de Caussade » en l’état. Les projets d’irrigation pour faire face au changement climatique et au manque d’eau sont des impasses s’ils ne sont pas accompagnés d’un véritable changement de modèle agricole.
En juillet dernier, la préfecture du Lot-et-Garonne a signé l’autorisation de travaux pour un projet qui vise à créer un bassin de 20 hectares de surface et 12 mètres de profondeur, en construisant sur le tracé du ruisseau de Caussade, une retenue d’eau d’un kilomètre de longueur, avec une digue de 378 mètres et haute de 12,5 mètres en travers de la vallée. C’est au final une réserve de près d’un million de m3 qui verrait le jour. Une moitié de celle-ci serait destinée à l’irrigation agricole et un quart au soutien d’étiage du Tolzac, rivière alimentée par le Caussade.
Ce projet s’appuie sur quelques exploitations qui déclarent avoir en projet une conversion d’une partie des surfaces exploitées à l’agro-écologie (arboretum de noisetiers, production de semences et surfaces maraîchères). Cependant, les agriculteurs s’engageant dans ce changement de mode de production sont non seulement minoritaires, mais rien ne les contraint à le mettre en œuvre et rien ne garantie les conditions de mise en oeuvre.
Pourtant, sur ce dossier, il faut se féliciter de l’attitude responsable et constructive des écologistes du département. Ils ont plaidé pour une profonde évolution des pratiques agricoles vers l’agroécologie et favorisé le dialogue entre la chambre d’agriculture et les associations environnementales en proposant de véritables conditionnalités pour rendre acceptable le projet : diminution de la taille et engagements contractuels à une conversion agro-écologique des irrigants.
La Mission régionale d’autorité environnementale (MRAE) pointe par ailleurs la carence de prise en compte de la problématique du changement climatique qui est de nature, comme indiqué dans l’étude d’impact, à induire « un dysfonctionnement très important de la retenue, remettant en cause sa vocation ». En clair, le remplissage de la retenue par les précipitations est d’ores et déjà compromis avec l’évolution actuelle du climat.
Mais force est de constater qu’au final, les promoteurs du projet n’ont pas redimensionné la retenue en fonction du dysfonctionnement probable pointé par la MRAE et d’un recours moindre à l’irrigation que permettrait un parcours agronomique et agroécologique conséquent.
La création de ce lac artificiel détruira plus de 3000 m2 de zone humide en amont et en aval du barrage et impactera significativement la faune et la flore, dont des espèces protégées (tulipes sylvestres, chauves-souris, coléoptères et six espèces d’oiseaux).
Les compensations environnementales envisagées sont jugées tout à fait insuffisantes par le Conseil national de la protection de la nature qui a rendu un avis défavorable à la demande de dérogation pour destruction d’espèces protégées. Enfin, aucune étude globale d’impact n’a été menée sur les 50 kilomètres de cours qui seront au final concernés (le Caussade et le Tolzac).
S’appuyant sur ces avis et la législation sur les espèces, la FNE et la SEPANSO contestent devant la justice l’arrêté préfectoral également pour non-respect de la directive cadre européenne sur l’eau.
Le président de la Chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne se dit prêt à entrer dans l’illégalité si les autorisations ne sont pas données. Ses déclarations ne sont pas de nature à favoriser un débat apaisé, nécessaire à l’ensemble des acteurs.
Le changement climatique est là et nous en subissons tous les conséquences. Nous devons tous ensemble nous interroger sur la gestion et l’utilisation de l’eau bien commun, en mettant en oeuvre des pratiques agricoles innovantes et respectueuses de l’environnement.
Groupe écologiste et citoyen au Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine
Voir à ce propos la réaction de Nicolas Thierry, vice-président à l’environnement et à la biodiversité de la Nouvelle-Aquitaine sur France 2, fin septembre 2018
Voir à ce propos l’interview de Nicolas Thierry dans la Dépêche du 1er octobre