Intervention relever le défi des compétences pour faciliter les recrutements
Intervention de Lionel Frel en séance plénière du 26 mars 2018
Monsieur le président, chèr·e·s collègues,
Je voudrais tout d’abord signaler l’oubli des syndicats comme partenaires des groupes de travail sur la réflexion sur les emplois du futur prévu par l’action numéro un.
Je voudrais aussi m’étonner de cette phrase qui s’apparenterait presque à un slogan du Medef : « trop de chômeurs, trop de postes non pourvus ! « , qui dans le contexte de chasse aux chômeurs lancée par le gouvernement pourrait laisser penser que la responsabilité du chômage serait du ressort des chômeurs. Il faut le dire, le chômage n’est pas de la responsabilité de ceux qui en sont les premières victimes.
Cette délibération est aussi l’occasion de faire le point sur la volonté de destruction méthodique de la formation professionnelle, continue et initiale, engagée par le gouvernement.
Les Régions venaient juste de prendre, il y a deux ans, la pleine responsabilité des plans régionaux de formation (PRF) pour les lycées publics que déjà on lui enlève le PRF de l’apprentissage, empêchant alors toute cohérence des deux systèmes.
Concernant la formation, il faut dénoncer la marchandisation de la formation : par exemple, avec le crédit formation. Jusqu’à maintenant exprimé en crédit d’heures, il est maintenant exprimé en argent sonnant et trébuchant, avec des formations accessibles par une application sur simple formation, un peu comme on choisit une table avec Trip Advisor.
C’est aussi le financement des CFA qui est transformé, avec un financement unique au nombre d’apprentis, qui rendent donc impossible tout travail de long terme et tout investissement pluriannuel.
C’est également la philosophie de la formation qui change avec ce plan d’investissements dans les compétences : on passe ainsi de la notion de formation, certifiantes, qualifiantes ou diplômantes, à la notion de bloc de compétences, c’est-à-dire à une hyper spécialisation, alors même que tout le monde s’accorde à dire qu’il faut développer l’adaptabilité, et donc des formations plus larges.
Sur l’apprentissage, il faut noter que le gouvernement passe à côté du problème principal de cette voie de formation, les taux de rupture de 30% et les taux d’abandon de 20%, qui peuvent aller jusqu’à 50%, par exemple, pour les enfants suivant un apprentissage dans les CAP des métiers du restaurant.
Le gouvernement oblige aussi les humanistes que nous sommes sur le travail des enfants, quand on sait qu’il veut ouvrir ce contrat de travail particulier à des enfants encore plus jeunes, on parle de 14 ans, qu’il supprime les autorisations de travail sur les machines dangereuses pour les mineurs alors même qu’il y a plus de 11 000 accidents du travail pour les apprentis (France entière, 2015), dont 11 décès et qu’il autorise le travail de nuit dans certains métiers pour les apprentis.
Cette destruction de la formation professionnelle toute entière a aussi des conséquences sur les lycées professionnels que la Région finance, avec la suppression de la part lycée de la taxe d’apprentissage, ce qui aura pour conséquence une nécessaire compensation par les conseils régionaux de l’ordre de 500 millions d’euros à l’échelle de la France.
Enfin, si on veut garder comme souci premier l’intérêt de l’enfant, il convient de garder comme service public de l’Éducation nationale, l’orientation dans les collèges et lycées.